« Je demande des minutes au spectateur, pas des secondes ! »
Quand il construit, peint et dessine, Ton Slits se profile surtout comme un concepteur et un créateur de systèmes. Il travaille alternativement de deux manières totalement différentes. Tantôt il construit par étapes des représentations relativement grandes, en concevant spécifiquement du petit vers le grand, et en s’aidant d’éléments, modules, particules et signes équivalents. Tantôt il pense et travaille tout à fait à l’inverse. Et du grand naît le petit. Comme s’il regardait la terre depuis l’espace, tel un astronaute, passant ensuite mentalement du macro au micro, et zoomant de la vue générale vers les détails insignifiants.
Par analogie avec le superbe film Gravity (2013), l’œuvre de Ton Slits démarre toujours de définitions de l’espace : l’homme aventureux explore l’infini ; pense du grand vers le petit ; met en place une hiérarchie et crée en fonction de cela de nouvelles structures sur la base de principes minuscules. S’ensuit — et comment pourrait-il en être autrement — l’expérience essentielle de l’espace, qui peut être aussi bien sphérique que réaliste. Après l’exploration vient finalement la reconnaissance. Le grand et le très grand se redéploient au départ du petit.
On dirait parfois qu’il veut semer le doute, en guise de contrepoids. Ainsi, les spectateurs ne savent pas s’ils ont ‘en face d’eux’ un microcosme ou un macrocosme. Le facteur humain est cependant toujours présent dans ses œuvres parfois très différentes en termes de taille, de proportion et d’échelle. On regarde d’ailleurs dans toutes les directions : devant, derrière, dessus, dessous, ... Ces aspects philosophiques et physiques sont d’une importance capitale dans le jeu réfléchi que le créateur conceptuel continue de jouer avec les spectateurs. Slits nous apprend en fait à regarder plus consciemment et à définir de manière plus vigilante. Et avant tout à vivre plus intensément des expériences.
D’un point de vue artistique, Ton Slits adopte une position particulière dans l’art d’aujourd’hui.
C’est comme s’il continuait tout à coup à humaniser les choses dans un sens métaphorique à partir d’une perspective atypique beaucoup plus grande.
Rick Vercauteren, conservateur de la Stedelijke Kunstcollectie Venlo, extrait du Cahier van Limburgs Finest#1, édition Museum van Bommel van Dam, Venlo, Pays-Bas